pour revenir au sujet et répondre à la question de Patrick:
Par John Henry Newman : "Lettre à Pusey" (extraits)
Je trouverai la doctrine de l'exaltation de Notre-Dame présente dans l'Écriture. Je veux dire la trouver dans la vision de la Femme et de l'Enfant du chapitre Douze de l'Apocalypse (...) La Vierge et l'Enfant n'est pas simplement une idée moderne; au contraire, elle est représentée encore et encore, comme chaque visiteur de Rome le sait, dans les peintures des catacombes. Marie y est peinte avec le Divin Enfant sur ses genoux. Elle, en prière avec ses bras étendus; Lui, avec ses mains en attitude de bénédiction. Aucune représentation ne peut avec plus de force exprimer la doctrine de la haute dignité de la Mère, et, j'ajouterai, de son influence auprès de son Fils (...)
A priori, s'il y est un Apôtre sur lequel nos yeux devraient se fixer, comme étant susceptible de nous enseigner sur la Sainte Vierge, c'est bien Saint=Jean, auquel elle fut confiée par notre Seigneur sur la croix; et avec qui, comme poursuit la tradition, elle a vécu à Éphèse jusqu'à ce qu'elle soit enlevée. Cette anticipation est confirmée a posteriori; car, comme je l'ai dit précédemment, l'un de nos informateurs les plus anciens et les plus complets sur sa dignité, comme étant la seconde Ève, est Irénée, qui est venu d'Asie Mineure à Lyon, et a été enseigné par le disciple immédiat de Saint-Jean .
La vision de l'Apôtre est la suivante :
"Un grand signe parut dans le ciel: une femme enveloppée du soleil, la lune sous ses pieds, et une couronne de douze étoiles sur sa tête. Elle était enceinte, et elle criait, étant en travail et dans les douleurs de l'enfantement. Un autre signe parut encore dans le ciel; et voici, c'était un grand dragon rouge (...) Le dragon se tint devant la femme qui allait enfanter, afin de dévorer son enfant, lorsqu'elle aurait enfanté. Elle enfanta un fils, qui doit paître toutes les nations avec une verge de fer. Et son enfant fut enlevé vers Dieu et vers son trône. Et la femme s'enfuit dans le désert" Apocalypse 12 : 1-6
Je ne nie pas, bien sûr, que derrière l'image de la Femme, c'est l'Église qui est signifiée. Mais ce que je maintiendrais c'est ceci : que le Saint Apôtre n'aurait pas parlé de l'Église avec cette image particulière, s'il n'avait existé une Sainte Vierge Marie, qui fut exaltée très haut, et qui fut l'objet de vénération de tous les fidèles.
Personne ne doute que "l'enfant Mâle" dont il est parlé est une allusion à notre Seigneur: pourquoi alors la "Femme" n'est-elle pas une allusion à sa Mère ? C'est assurément le sens évident des mots; bien sûr ils ont aussi un autre sens, pour lequel nous est donnée l'image : sans doute l'Enfant représente les enfants de l'Église, et sans doute la Femme représente l'Église. C'est, je le concède, le sens réel ou direct; mais quel est le sens du symbole par lequel ce sens réel est véhiculé ? Qui sont la Femme et l'Enfant ? Je répond qu'ils ne sont pas des personnifications mais des personnes ! Ce qui est vrai de l'Enfant, l'est par conséquent de la Femme.
Mais encore : non seulement la Mère et l'Enfant, mais un serpent est introduit dans la vision. Une telle rencontre entre un homme, une femme et un serpent, qui n'a pas été trouvée dans l'Écriture depuis son début, se retrouve maintenant à sa fin. De plus, comme pour combler un vide avant que l'Écriture n'arrive à sa fin, on nous expose pour la première fois dans le passage de l'Apocalypse, ce qui était signifié au début de l'Écriture, que le serpent du Paradis était l'esprit du Mal. Si donc le Dragon de Saint-Jean est le même que le serpent de Moïse, et que l'Enfant Mâle est "la postérité de la Femme", pourquoi alors la Femme ne serait-elle pas celle dont la postérité est l'Enfant Mâle ? Et, si la première femme n'est pas une allégorie, pourquoi la seconde le serait-elle ? Si la première femme est Ève, pourquoi la seconde n'est-elle pas Marie ?
Mais ce n'est pas tout. L'image de la femme, selon l'usage habituel de l'Écriture, est trop hardie et importante pour être une simple personnification. L'Écriture ne raffole pas des allégories. Nous y avons souvent figures, comme lorsque les écrivains sacrés parlent du bras ou de l'épée du Seigneur; et aussi lorsqu'ils parlent de Jérusalem ou de Samarie comme féminines; ou de l'Église comme un épouse ou comme une vigne; mais ils n'habillent pas trop d'attributs personnels des idées abstraites ou les généralisations(...) L'Écriture s'occupe des types plutôt que des personnifications. Israël représente le peuple choisi, David le Christ, Jérusalem le Ciel. Considérez ces remarquables représentations, que je dirais dramatiques, dans Jérémie, Ézéchiel, et Osée : prédictions, menaces, et promesses sont matérialisées par les actes de ces prophètes. Il est commandé à Ézéchiel de se raser la tête, et de diviser et de disperser ses cheveux; et Ahias déchire ses vêtements, puis en donne dix parts sur douze à Jéroboam. De même, la structure de l'image dans l'Apocalypse n'est pas une simple création allégorique, mais est fondée sur le rituel juif. De la même manière, les guérisons physiques de notre Seigneur sont les types visibles de la puissance de sa grâce sur les âmes, et sa prophétie sur le dernier jour évoque celui de la chute de Jérusalem. Même ses paraboles ne sont pas simplement des abstractions mais des relations de faits, qui ont ou auraient pu avoir lieu, et par et qui sont porteurs du message spirituel. La description de la Sagesse dans les Proverbes et les autres livres saints, a réveillé l'instinct des commentateurs dans ce sens. Ils ont senti que la Sagesse ne pouvait être qu'une simple personnification, et ils ont déterminé que c'était notre Seigneur: et le plus récent de ces livres, par son propre langage ferme, a justifié cette interprétation(...).
Revenant alors à notre vision de l'Apocalypse, je demande : si la Femme doit être une personne réelle, qui peut être la personne que l'Apôtre a vue, et vise et qu'il décrit, sinon cette même incomparable Mère à laquelle les chapitres des proverbes font allusion? En outre, qu'il soit observé que dans ce passage qui fait allusion à l'histoire de la Chute, on peut dire de Marie qu'elle est représentée sous le caractère de la seconde Ève. J'ajoute une remarque : il est parfois demandé pourquoi les écrivains sacrés ne mentionnent pas la grandeur de notre Dame. Je réponds qu'elle était ou était encore probablement vivante quand les Apôtres et les Évangélistes ont écrit. Il n'y a qu'un livre de la Bible dont nous sommes certains qu'il a été écrit après sa mort, et ce livre (pour ainsi dire) la canonise et la couronne.
Mais si tout est ainsi, si c'est réellement la Sainte Vierge que l'Écriture représente comme vêtue du soleil, couronnée des étoiles du ciel, et avec la lune comme marchepied, quel point de gloire ne doit-on pas lui attribuer alors ? Et que devons-nous dire à ceux qui, par ignorance, contredisent la voix de l'Écriture, le témoignage des pères et la tradition de l'Est et de l'Ouest, et parlent et agissent avec mépris contre celle que le Seigneur s'est plu à honorer ?
http://v.i.v.free.fr/pvkto/john-newman- ... pusey.html